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 MOBILIER D’EXCEPTION 

Splendide Table d’architecte à la tronchin,

présentée par Olivier Kraemer

Cette table est caractéristique de l’ébéniste Roentgen, mais pas tellement courante. Il n’en existe aujourd’hui seulement quelques-unes. C’est une table appelée « Tronchin », inventée sous le règne de Louis XVI, par le docteur Théodore Tronchin originaire de Genève et qui avait pour habitude de soigner des architectes qui souffrait de mal de dos car souvent penchés sur leur plan de travail. Il a donc l’idée d’inventer ce modèle de table pour les soulager.

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David Roentgen (1743-1807) est un ébéniste et marqueteur d’origine allemande qui travailla pour la cour de France au XVIIIe siècle. Il s’associe avec Pierre Kinzing, horloger réputé, grâce à qui il se spécialise dans les meubles à mécanisme. De grands noms de l’aristocratie font partie de sa clientèle, à l’instar de Marie-Antoinette et Catherine II de Russie. L’œuvre de Roentgen est prolifique et influencée par de nombreuses influences européennes. Il faut ajouter à ses meubles en marqueterie qui ont fait sa renommée ses massifs ouvrages en placage d’acajou.

 

Ce modèle de table Tronchin date de la fin du XVIIIe siècle et est plaqué d’acajou. Il est possible d’adapter la table à la hauteur que l’on souhaite grâce à diverses parties crantées. Elle sert également à écriture grâce à une partie écritoire qui coulisse pour ranger des documents. Une petite réglette apparaît pour permettre de poser un livre.

 

Le livre en question représente une table très similaire figurant au musée Nissim de Camondo, situé au 63 rue de Monceau et comporte un extrait du « Journal des Luxus und der Moden » publié à Weimar de 1795, où Roentgen expliquait les différentes techniques qu’il appliquait sur ces tables. Les artisans du XVIIIe siècle développèrent un grand engouement pour les meubles dissimulant des mécanismes qu’ils mirent à la mode.

 

Une quarantaine de tables du même type ont été réalisées, on en connait une dizaine dont la plupart figure au palais de Pavlosk et à l’Ermitage de St Pétersbourg, une autre presque identique figure dans la collection du duc de Devonshire au château de Chatsworth. Enfin, le Metropolitan Museum of Art de New-York possède une table dans le même esprit.

Ébéniste parisien d’origine allemande, Jean Holthausen obtient sa maîtrise en 1764. 

Son œuvre couvre les mouvements Régence, Louis XV et Transition, mais ayant obtenu sa maîtrise tardivement, peu de ses meubles sont estampillés. Ses réalisations révèlent une préférence pour les marqueteries de fleurs, de cube, d’attributs et il se démarque par un attrait pour les laques d’Extrême-Orient sous forme de placage.

Les laques dits « de Coromandel » ont été mis au point à partir du XVIIè siècle en Chine. Elles ont été nommées ainsi par les Anglais, en référence à la côté orientale de l’Inde où étaient chargées les laques sur les navires de la Compagnie des Indes. La technique du laque est la superposition de fines couches de bois recouvertes de tissu maintenues entre elles par de la colle végétale. Le laque obtenu était ensuite peint et décoré de motifs par de profondes incisions.

Ces laques décoraient à l’origine des cabinets et des paravents de grande taille qui étaient ensuite démontés par les artisans européens afin de les appliquer sur les meubles à la mode. C’est ainsi que des panneaux de laque se sont retrouvés sur les commodes, encoignures et autres meubles.

Cette commode en laque de Coromandel reflète le goût pour l’Orient des pays occidentaux et particulièrement de la France dès 1730 à partir du règne de Louis XV, sous l’influence des marchands-merciers. Ils prélevaient le laque sur les meubles importés qu’ils affinaient ensuite pour les plaquer sur le bâti de leur meuble. Une fois intégrés au meuble, ces laques recevaient des montures en bronze doré finement ciselées.

A travers cette commode, Holthausen réalise un magnifique exemple de la pratique de son temps où l’artisan décide d’apposer le laque sur un meuble de couleur noire afin de créer un ensemble harmonieux et respectueux de l’esthétique originelle du panneau. 

La forme légèrement bombée de la façade donne vie aux personnages dépeints sur les panneaux de laque. Les bronzes se retrouvent discrètement en chutes, en lignes de chute, en sabots, en entrées de serrure et en poignées. Ils viennent définir et rehausser les lignes très délicates de la commode par leurs jeux de courbes et contre-courbes dignes du style Louis XV. Le dessus de marbre noir veiné vient sommer l’ensemble et souligner le galbe du meuble par sa mouluration délicate.

Les meubles ornés de laque sont rares dans l’œuvre de Holthausen, ce qui fait de cette commode un modèle unique en son genre.